C’est plus fort que moi: lorsqu’il neige j’enfile deux pantalons, je sors un de ces pulls qui ne servent qu’à cette occasion et je sors marcher sous la neige. J’aime le bruit de mes pas alors que je déteste avoir du coton en main. Ces deux sensations sont pourtant très similaires.A chaque fois mes pas me guident vers le même chemin, au travers des champs en direction du clocher du village. J’ai rarement vu ce petit hameau sous la neige, pourtant je me souviens l’avoir souvent dessiné à l’école quand j’étais petit. En même temps que je lutte contre le froid je m’imagine les paysans qui ont jadis habité ici alors qu’il neigeait bien plus régulièrement.
Cette nostalgie qui m’assaille toujours au moment auquel je ne m’y attends pas m’étonne toujours. Je suis passionné par les nouvelles technologies, je me désole quand je pense que je vais mourir sans savoir jusqu’où peut aller l’humanité, je n’écoute pratiquement que des musiques électroniques et pourtant je ne peux pas m’empêcher de regarder toujours en arrière.
Aujourd’hui je me suis surpris à pousser la porte du cimetière. La dernière fois que j’y suis rentré j’étais à l’école primaire et il s’agissait d’accompagner le maire un 11 novembre. La scène était particulièrement surréaliste. Les tombes étaient recouvertes de neige, tout était blanc au lieu du marbre noir ou gris des cimetières. En parcourant les allées j’y ai retrouvé un certain nombre de noms connus dans le village et des gens que j’ai connu. En cette période de fêtes, où l’on est plus sensible à son prochain cela m’a fait remonter à la mémoire tous ces gens qui ont fait partie de mon enfance mais auxquels on ne pense pas au quotidien et puis la famille, cet ami qui nous a quitté il y a un an.
Je me suis comme enfui de ce lieu avant de ne sombrer plus profondément dans les abimes du passé. En rentrant dans le village j’avais envie de croiser des enfant avec des luges faisant des batailles de boules de neige, un commerçant qui déneige devant son magasin, des vitrines décorées, des illuminations de Noël. Le bilan à l’image du temps a été bien mitigé, le village n’était pas du tout à la fête, les commerçant n’ayant pas forcément fait d’efforts. Il y avait cependant des jeunes qui faisaient une bataille de boule de neige mais ce n’était pas comme dans les livres.
J’en suis venu à me demander si les auteurs de telles scènes auxquelles on se raccroche, auxquelles on aspire n’ont pas été idéalisées par les auteurs et que l’on courrait après un monde qui n’a jamais existé. Cela ne m’a pas empêché en rentrant de faire comme chaque année une reconstitution d’un petit village avec des petites maisons, des figurines avec des enfants qui jouent dans la neige ou qui font du patin à glace. Cela a eu la vertu de me faire évacuer mes bouffées de nostalgie car même si elles représentent des maisons du passé, ces figurines sont bien là devant mes yeux.