Comme chaque année, on guettait leur retour avec impatience (ou du moins un certain intérêt), elles sont arrivés comme toujours à l’improviste, au moment où on s’y attendait le moins. Leur bourdonnement incessant a empli la maison. Eprises d’une fièvre butineuse, surtout avec le temps gibouléen (ne cherchez pas dans vos dictionnaires, c’est un jeu de mots que seuls les informaticiens peuvent comprendre) qui s’est installé sur la Touraine depuis de longues semaines.
Leurs émanations voltigent dans les airs et viennent s’attacher à tous les objets un peu sombres, emplissant nos poumons à petite dose. Le paysage prend des teintes chatoyantes, comme s’il avait plu de l’or dans les champs. Cet effet n’en est que renforcé avec le ciel menaçant qui contraste. Bien que rassemblée en tas, quand on y regarde de plus près c’est un chaos que ces géantes ont laissé derrière elles. De ce chaos naitront des formes géométriques cylindriques ou parallélépipèdiques (non non ne cherchez pas de jeu de mot, en plus ce terme existe vraiment) que nous nous efforcerons d’entasser car comme chaque année notre voisin nous demandera de lui rendre service alors que pour moi c’est une véritable fête que de participer à ce ballet.
Ce soir la nuit est tombée, mais saisie de leur frénésie elles continueront jusqu’au lever du jour leur tâche méthodique. Leur énorma carapace jaune et leurs phares éblouissants feront le remake des rencontres du troisième type. En cette période, si l’on se sent seul à la campagne il suffit de jeter un coup d’oeil par la fenêtre pour découvrir une vie trépidente et ce n’est pas finit car il faudra ensuite, écraser, griffer, labourer, semer, traiter, pour que tout soit de nouveau comme avant leur passage pour l’année prochaine.